On habite si bien Berlin qu'avec mes amis de Sciences Po, j'ai eu ce besoin joyeux de sortir de la ville, de me confronter à un nouvel inconnu. Je les voulais quitter elle et son immensité.
Je n'avais jamais vu la mer Baltique, son simple nom résonnait en moi avec exotisme. J'aimais l'idée me tenir l'extrémité du continent.
Nous avons quitté un Berlin gris et pluvieux et pris le train, encore endormis.
Nous sommes arrivés à Warnemünde, il faisait beau. On avait la joie des petits enfants qui voient pour la première fois la mer s'étaler devant eux. C'était beau, plus sauvage que la méditerranée. Le vent, violent et glacial, nous a rappelé la force des éléments. Samedi, rester sur la plage était téméraire, presque impossible. Nous avons visité la ville portuaire. Les couleurs de l'eau, des phares, bateaux et maisons étaient joyeuses et vives. Les allemands en weekend achetaient du poisson frais et des fishs and chips.
Nous sommes en vacances, c'est notre dernier weekend avant la reprise.
Le dimanche, le vent s'est tu. Le soleil brillait et, emmitouflés, nous sommes allés sur la plage.
C'est étrange comme le silence se fait face à la mer, comme tout paraît anodin, presque contingent. On peine à s'imaginer que cette immensité ait une fin. Assise, j'ai pensé à ceux en France qui, en ce moment, une fois encore vivent dans les cris et la colère. Je me sentais à la fois loin et très proche. Et complètement impuissante.
Autour de nous, beaucoup de personnes marchent, sont venus prendre l'air. Une dame nous aborde, elle parle parfaitement le français, a étudié en France. On parle un peu ensemble, c'est court mais cela me met la joie au cœur. J'aime comme les gens ici se parlent.
L'après midi, nous partons pour Rostock. La ville est belle mais complètement déserte. Je préfère l'activité, le bouillonnement des villes, alors je me l'imagine.
Déjà le weekend est fini. Dans le train, avec mes amis français on parle encore, toujours, posément ou avec véhémence. Partir encore nous rapproche.
Hier c'était la rentrée. J'avais une drôle de boule au ventre, cette drôle d'appréhension que je n'avais pas ressenti depuis longtemps. Nous avions déjà eu des journées d'orientation, je connais d'autres étudiants. Ils viennent du Japon, beaucoup de Hongrie, d'Indonésie, de Hollande ou de Belgique. Et avec notre allemand -un peu plus fluide- nous apprenons peu à peu à nous connaître. Nous faisons des projets. Jamais je n'ai savouré à ce point de pouvoir dire « à demain à quelqu'un ».
Avec quelques uns nous avons fait du vélo autour du Wannsee, immense lac au bord de Berlin, tristement connu pour avoir accueilli une conférence organisant la solution finale. On peine à imaginer que des choses aussi horribles aient plus être imaginées dans un tel cadre.
Mes premiers cours ont eu lieu. Et si c'est difficile, si je ne comprends que partiellement, ma motivation est loin d'être entachée. Oui, je vais y arriver!